samedi 14 juin 2008

A la batte de baseball

Samedi dernier, accompagnés de militants israéliens pour la paix, nous avons rendu visite à une famille de bergers palestiniens. Cette famille vit sous tente, dans le sud de la Cisjordanie, à quelques encablures d'une colonie israélienne (Susiya). Avec eux, nous avons bu un thé, mangé de la pastèque, discuté et rigolé. Nous avons repris la route en nous disant que nous avions rencontré des gens fort chaleureux et d'une gentillesse infinie.

Le lendemain après-midi, le père et la mère de la famille, leur neveu et sa femme ont emmené paître leur troupeau de chèvres. Ils étaient à peine arrivés que deux colons - une vingtaine d'années chacun - sont venus sur leur vélo pour leur dire qu'ils avaient intérêt à déguerpir. Les deux colons sont revenus dix minutes plus tard, avec deux de leurs camarades et des battes de baseball. La belle-fille du couple palestinien a filmé une partie la scène qui s'en est suivie (elle a été contrainte de lâcher la caméra pour aller appeler du secours). Voici la vidéo.
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Inconsciente, la maman, 57 ans, a dû être transportée d'urgence dans un hôpital israélien; elle est en ressortie trois jours plus tard avec un bras ainsi qu'une pommette cassés et un visage meurtri. Son mari, 70 ans, et son neveu en ont été quittes avec des contusions à la tête et ont été traités dans un hôpital palestinien. La nièce a pu être soignée sur place. Pour l'instant, la police n'a arrêté ni interrogé personne. C'est son porte-parole qui l'a affirmé.


Nous avons revu la famille cette semaine; tous souffrent encore beaucoup. Ils sont sous le choc, effrayés. Mais, ils sont plus déterminés que jamais à ne pas quitter une terre qui les a vus naître, vivre et souffrir. Un phénomène compréhensible mais totalement déroutant pour un petit Suisse de 28 ans qui n'a, à peu près, dû se battre que pour pouvoir s'asseoir dans le train TPF aux heures de pointe.

Aux chapitres des bonnes nouvelles - oui, ça existe aussi par ici - la presse israélienne a parlé de cette agression. Deux articles dans Haaretz, l'un des plus grands quotidiens, lui ont été consacré (pour ceux qui ont le temps et l'envie, la lecture des commentaires suivant l'article vaut la peine). Et si cette famille était en possession d'une caméra et que la vidéo a pu avoir un tel écho, c'est avant tout grâce à un projet lancé il y a une année par une organisation israélienne appelée B'tselem. De ce projet importantissime, il va en être question dans mon prochain article.

7 commentaires:

Ipodfan a dit…

Pourquoi ces jeunes Israéliens demandaient aux bergers palestiniens de déguerpir ? J'imagine qu'ils ne faisaient pas paître leurs troupeaux en des lieux qui leur étaient interdits. Alors pourquoi tout d'un coup on leur demande d'aller ailleurs ? Et où ailleurs, si chaque fois on leur barre la route?
Comme tu dis, quelle détermination et quel amour de leur terre ils ont ces Palestiniens, pour tenir le coup et ne pas s'exiler.

José a dit…

je trouve ça vraiment désolant.Merci de nous le faire partager,pour qu'on puisse s'en rendre compte via les paroles de quelqu'un qu'on croit(la plupart du temps...).Il est vrai qu'on voit beaucoup d'image, mais PPDA et consors ne le transmettent pas aussi bien que toi et il ne le vive pas.Merci beaucoup. Mais je trouve ça vraiment bête,stupide et inutile. Ne pouvons-nou que nous indigner et pester contre l'injustice que vivent les palestiniens?

Stephane a dit…

Jean-Marie, Stéphane m'avait dit de prendre le temps de lire ton blog. Je le découvre aujourd'hui et je dois te dire que -entre deux sanglots d'Aimée- je l'ai dévoré. Et je dois bien t'avouer que tes histoires m'ont émue et souvent, révoltée. Tu humanises une situation que l'on connait sans trop plus y faire attention, comme tu le soulignes dans ton premier poste. Continue comme ça car un peu grâce à toi, un peu grâce à tout ceux qui "bougent" comme toi, nous n'oublierons pas...

Camille
ps. Dis-leur, même si cela est bien peu, que nous pensons à eux...

Stephane a dit…

C'est désolant...

Garde nous au courant des suites de cet épisode... s'il y en a

Jean-Marie Pellaux a dit…

Les Palestiniens étaient dans un champ qui leur appartient et qui se situe à 300 mètres de chez eux. Pourquoi "on" leur demande de déguerpir? Car "on" estime que cette terre revient de droit (divin, biblique) aux Juifs. Il faut savoir que cette famille (comme quelques autres) a déjà dû s'exiler quatre fois dans les vingt dernières années et a vu ses tentes détruites à plus d'une reprise . Si je trouve le temps (et je vais le trouver), j'expliquerai tout cela en détail dans un futur article.

Jean-Marie Pellaux a dit…

Camille...je leur transmettrai to message de soutien. En échange, fais de gros bisous à Aimée.

Jean-Marie Pellaux a dit…

José...je te cite: "qu'on croit (la plupart du temps)". C'est vrai que je suis quelqu'un qui ai parfois tendance à exagérer. Pour rendre les histoires plus rocambolesques, plus émouvantes, plus glorieuses.

Mais ici, nul besoin. Retranscrire froidement les faits est largement suffisant.

A part nous indigner et pester contre ces injustices, je crois que cela vaut la peine d'en parler autour de soi. L'information est capitale dans ce conflit. Il faut qu'elle circule...elle pourrait toucher les personnes qui ont, un tant soit peu, les moyens de faire évoluer la situation. C'est vrai que ce n'est pas toujours facile de se convaincre.

Et s'informer, c'est aussi faire preuve de solidarité.

Une bonne occasion de vous remercier tous pour prendre le temps de lire ce blog.