lundi 14 juillet 2008

Moyline et le miracle de l'ordi

J'ai eu le bonheur de recevoir la visite de ma bien-aimée au début de ce mois. Des retrouvailles délicieuses et très rythmées. De Jaffa à Hébron en passant par Bethlehem, Moyline a passé six jours à découvrir la région et à sauter d'un bus à l'autre. Mais aussi six jours à faire connaissance avec l'amabilité, la bienséance et le savoir-vivre des forces et autres agents de sécurité israéliens. Pour illustrer cette chaleureuse page de son voyage, elle a d'ailleurs été d'accord de nous raconter les problèmes auxquels elle a dû faire face lors de son départ de l'aéroport Ben Gourion.

Hébron, son climat pesant, sa tension. Moyline rumine tout cela sur Suhahda street, rue interdite aux Palestiniens

Avant cela, deux précisions. De un: mon ordinateur étant tombé en panne au début de mon séjour, j'ai demandé à Moyline de le ramener en Suisse. De deux: il est fortement déconseillé de dire aux agents de sécurité de l'aéroport que l'on est allé faire un tour en Cisjordanie (je ne parle même pas de Gaza). Pourquoi? Car ils n'aiment pas du tout cela, vont vous fouiller vos bagages complètement et vous interroger pendant plusieurs heures. C'est déstabilisant, parfois humiliant, toujours désagréable et vous risquer de louper votre avion et de figurer sur une liste noire (interdiction de fouler le territoire israélien). J'ai donc conseillé à Moyline de dire qu'elle n'était qu'une simple touriste et que son petit copain était en Suisse et non à Hébron où elle n'avait d'ailleurs jamais mis les pieds...Voici son histoire :

« Dans la file d'attente, une première femme me pose poliment des questions, tout en examinant mon passeport.
- Quelle est la raison de votre séjour en Israël ? - Tourisme.
- Avez-vous rendu visite à quelqu’un ? - Non.
- Vous voyagez donc seule ? - Oui.
- Quelles villes avez-vous visitées ? - Tel-Aviv, Jaffa, Jerusalem.
- Quelle est votre destination ? - Genève.
- Est-ce que vous avez fait vous-même vos bagages ? - Oui.

La femme colle ensuite des étiquettes sur mon passeport et mes bagages. Sur ces étiquettes figurent un numéro : le 5, qui indique le niveau de dangerosité du voyageur. Jean-Marie m’avait prévenue qu’il ne fallait pas être déstabilisée par le ton désagréable que peuvent avoir les agents de sécurité pour s’adresser aux voyageurs. Comme ce n’a pas été le cas avec cette dame, je passe au deuxième poste de contrôle, soulagée.

Je dépose alors ma valise, mon sac à main et l’ordinateur portable sur le tapis roulant de la machine à rayons X. Je récupère mes affaires et me dirige vers d’autres agents de sécurité postés derrière une table. Deux femmes me questionnent à nouveau. Mêmes questions que la première fois, sur un ton nettement moins amical. Une troisième femme reprend le portable pour le contrôler une seconde fois. Je lui dis que cela a déjà été fait et que, de toute façon, il ne fonctionnait pas. Et c’est là que les choses ont mal tourné. S’ensuit un long interrogatoire. Des questions fusent de part et d’autre des agents que j’ai en face de moi (4-5 personnes en tout). Les mêmes questions qu’au départ, puis d’autres, plus ou moins pertinentes, le but étant de me déstabiliser au cas où j’avais quelque chose à cacher.

- Depuis quand votre ordinateur ne fonctionne-t-il plus ? Est-ce qu’il vous appartient ? Connaissez-vous bien votre ami ? Comment s’appelle-t-il ?
(En tombant sur un livre intitulé « Israël, Palestine. Vérités sur un conflit ») - De quoi parle ce bouquin ? Pourquoi ça vous intéresse ? Vous parlez l’arabe ? L’hébreu ?
- Quelles villes avez-vous visitées ? Quels sites touristiques avez-vous vus ?
- Avez-vous rendu visite à quelqu’un ? Pourquoi êtes-vous venue en Israël maintenant, et pas une année avant ou après ?
- Où avez-vous logé ? Le nom de l’hôtel ? Quel bus preniez-vous pour aller à l’hôtel ? Comment l’avez-vous trouvé ? Vous avez un guide ? Sortez-le. Montrez-moi où se trouve l’adresse de l’hôtel en question.

Une autre personne fouille ma valise, sort tous les objets, en remet une partie à l’intérieur et m'ordonne « Remettez le reste de vos affaires dans la valise ». Elle me pose aussi des questions. Verdict: tant que l’ordinateur ne fonctionne pas, je ne pourrai pas le ramener en Suisse. Ils vont donc le garder 24 heures. Je devrai aller le déclarer au Service litige bagages de Genève pour le récupérer le lendemain. Exaspérée, je fusille l’agent des yeux. Elle me répond « C’est une démarche normale ici. C’est pour la sécurité. »

Une heure après être entrée dans l’aéroport, je peux enfin aller à l’enregistrement. Une des agents m’accompagne. Elle me dit qu’elle va me suivre jusqu’au contrôle des passeports, ainsi je pourrai éviter le dernier contrôle de sécurité. Je lui dis que je ne souhaite pas y aller tout de suite, qu’un ami m’attend dehors. Je n’ai pas le choix: je dois dire au revoir à cet ami maintenant. Je pose ma valise, me dirige vers la sortie quand je l’entends me dire « Attendez, je viens avec vous ». Suivie de près par cet agent, tendue et au bord des larmes, je rejoins Jean-Marie. Nos adieux se résumeront à une étreinte courte et amicale sous l’œil bienveillant de notre agent, postée à un mètre de nous et à l’écoute de nos paroles.

Quatre jours plus tard, la poste me livre l’ordinateur. Miracle, il fonctionne parfaitement. Un grand merci aux autorités israéliennes. »


Sortir du pays n’a pas été chose aisée pour Moyline

Sachez que ce qui est arrivé à Moyline n’a rien d’exceptionnel. D’après les différents témoignages que j’ai entendus, elle s’en est même bien sortie. Certains n’ont jamais revu leur ordinateur.

Reste à savoir à quelle sauce et pendant combien de temps je vais me faire cuisiner dans deux semaines. Une chose est sûre : ça sent méchamment le roussi.

2 commentaires:

Ipodfan a dit…

Moi qui ne suis pas capable de régler mes problèmes d'ordi, je saurai à qui faire appel dorénavant... Et en plus les réparations sont gratuites!
On peut certes comprendre la méfiance des Israéliens envers les terroristes ou poseurs de bombes mais aller jusqu'à faire de chaque étranger un ennemi potentiel, il y a quand même une marge ou même un sacré fossé. D'autre part, on se rend compte à quel point ces fonctionnaires sont formés pour déstabiliser n'importe qui. ça me fait les frissons dans le dos.

alpamayadoc a dit…

Cher Jean-Marie
Finalement ils sont très écolos ces Israéliens!
J'aurais aussi un vieux ordinateur portable qui ne marche pas très bien à faire réparer en Israël.